D’origine juive arménienne, Kémar Gulbenkian est le chanteur enragé et engagé du groupe français "No One Is Innocent".
En parallèle de l'article sur "No One", je tenais à mettre l'accent sur Kemar et notamment sur son excellent Album solo : PRENOMBETTY.
Petite rétrospective...
La première fois où Kemar monte sur scène, c’est en 1977. Il se prénomme Marc, a dix ans, et c’est à l’Olympia, pour la première partie de Charles Aznavour au sein de la Chorale Arménienne de Paris…
Celui qui s’est rebaptisé (verlan oblige) Kemar sourit :
« Mon père ne s’est peut-être pas rendu compte de ce qu’il avait fait, ce jour-là, en me donnant le goût de la scène… C’est à lui et à ma grand-mère que je dois d’avoir été imprégné de la culture arménienne...Sans haine. Juste en m’expliquant qui j’étais et d’où je venais. J’ai été élevé dans la tolérance sur les choix, religieux et autres. Le communautarisme, ce cocon où l’on se monte le chou entre soi, m’a toujours fait peur. » Influences diverses : en 1980, Marc écoute les Talking Heads, Devo, David Bowie, les Beatles, Black Sabbath, Les Clash et les Sex Pistols. « Je me suis forgé moi-même ma personnalité musicale, se souvient-il, parce qu’à la maison, le livre était partout. » Et pour cause : son père travaille pour le Livre de Poche…
En compensation, la famille Gulbenkian voyage à travers toute l’Europe. En 1986, Marc étudie à la Sorbonne, section urbanisme, et rejoint, après une petite annonce, les David Vincent, groupe « rockabilly » auquel il apporte, au chant, une rage salutaire. Jusqu’en 1992.
1993 est une année rare : des musiciens s’agrègent, formant No One Is Innocent, un manager exceptionnel les prend sous son aile, les concerts s’accumulent. Le premier album sort en mai 1994 chez Island.
Sort, alors, l'un des meilleurs albums de rock français, avec un titre phare "La Peau", cette galette avec un style Fusion et des paroles revendicatives, dans la lignée de Rage Against The Machine font mouche auprès du public français.
Peu de temps après l'album "La Peau", il collabore avec les groupes de rap EJM et Timide Et Sans Complexe pour le EP 4 titres "Antipolitique".
Après 4 années de vie rêvée de "rock-star", commencent alors, la mutation, avec, en 1996, la rencontre avec l’auteur de romans policiers prophétiques Cyber-Punk, Maurice G. Dantec : cinq textes de lui figurent dans le second (et superbe) album, Utopia, en 1997. Mais le rock consume les énergies et décuple les ambitions.
Kemar abandonne en 1998 : « Rien ne me faisait plus vibrer. Je pars aux Philippines, où je trouve la racine de ce qui va devenir mon album solo : l’oxygène, les voyages, une paix intérieure que je n’avais pas eue depuis cinq ans. Défendre en permanence un côté revendicatif pèse très lourd sur les épaules. »
Après les déboires de sa formation, il se lance donc en solo et sort un album en 2002 : PRENOMBETTY. Un album plus ‘Lounge’ et ‘Trip-Hop’…fortement influencé par Tricky ou Serge Gainsbourg. Sûrement son album le plus personnel , le plus poétique…à mille lieues des textes enragés de No One. Hélas, les ventes ne connaissent pas le succès mérité.
En 2003, Kemar rencontre K-mille, compositeur de UHT, groupe électronique « underground ». Ils décident de faire de la musique ensemble. Pour un second album solo ? Un an plus tard, il devient clair pour Kemar qu’il s’agira d’un nouveau No One Is Innocent. Le temps de racheter les droits aux membres de l’ancien groupe (qui ne sont pas partie prenante de l’aventure), de rassembler une nouvelle formation et voici venir Revolution.com… On y retrouve les ingrédients essentiels de No One : guitares énervées, dénonciation et vociférations – un brin plus civilisées. « Revolution.com » (le titre), avec son univers électronique, est un pied de nez au monde des écrans froids : « Voici le nouveau monde/ Des combattants virtuels/ (…)/ Des pavés en pixels/ La souris se déplace/ Elle se bouge à ta place »… On trouve sur cet album un mélange de ballades d’amours tourmentées qui auraient pu trouver place sur une suite de Prénom Betty et de morceaux plus bruyants. Ainsi, Kemar semble parvenu à l’équilibre entre la rage d’avant-hier et l’apaisement d’hier. Moins de vociférations, mais une foi intacte dans ce que doivent être l’homme, sa vie et sa place dans le monde.
En 2007, le nouvel opus, « Gazoline » est un véritable mix des précédentes périodes et offre un album au mixage plus fin, aux ambiances variées et habité de part en part par l’esprit du Leader.
Morceaux choisis :